Portraits de femmes Lozériennes en première ligne

Mis à jour le 13/03/2021

Cette semaine est marquée par la journée internationale des droits des femmes, lundi 8 mars 2021.

C’est aussi l’occasion de célébrer des parcours de vie de Lozériennes, des exemples pour les femmes et les jeunes filles d’aujourd’hui et de demain.

En mettant à l’honneur trois parcours, Valérie Hatsch, Préfète de la Lozère, rend hommage à toutes les Lozériennes qui sont en première ligne face à la crise sanitaire.

La crise Covid19 a bousculé leur quotidien. Leurs routes ne se sont peut-être jamais croisées mais elles partagent des valeurs communes, le courage et la volonté.

  • Chaque jour, leur action prend corps auprès de celles et ceux qui ont besoin d’elles.
  • Chaque jour, leur action prend sens au service de l’intérêt général.
  • Depuis le début de l’épidémie COVID19, au quotidien, chacune à son poste, œuvre sans relâche.
  • Comme de nombreuses Lozériennes, modestes mais déterminées, toutes sont encore fortement sollicitées.
  • Leur mobilisation et leur engagement sont exemplaires.
  • En ces jours célébrant les droits des femmes, je pense particulièrement à elles

Valérie Hatsch, Préfète de la Lozère

 

  • Adeline Meynier
  • 35 ans, union libre, 2 enfants, 4 et 7 ans.
  • Responsable des caisses depuis 7 ans à Hyper U Mende où elle travaille depuis 11 ans.
  • Etudes d'électricité, titulaire d’un BTS informatique de gestion en poche.
  • A débuté au rayon textile d'Hyper U après avoir exercé dans la restauration rapide. 

« Tout est possible quand on s'en donne les moyens »  

                      Adeline Meynier

Votre profession a été au front dès les premiers jours de la crise sanitaire ? Comment avez-vous vécu cette période inédite ?

« La 1er vague, au premier confinement, nous étions dans l'inconnu, nous n'avions pas d'historique sur ce virus. On ne savait pas comment les personnes allaient le vivre, ni comment ils allaient consommer.Au début, nous devions faire face à des journées d’affluence de type Noël, aux rayons dévalisés, aux ruptures de produits de première  nécessité, à l'afflux de commandes au drive. Nous devions gérer les problèmes au quotidien, face aux conséquences d'un virus inconnu. » 

 Comment votre quotidien professionnel a-t-il été bousculé ?

« Nous nous sommes adaptés en mettant en place des initiatives dont le Drive pour les soignants afin de faciliter leur quotidien durement touché. Au fil du temps, nous avons dû également répondre à la gestion du personnel, beaucoup étant en chômage partiel pour garder leurs enfants. Les lignes de caisse étant majoritairement occupées par des mamans, nous avons été obligés de gérer au quotidien un fort taux d'absentéisme, jusqu'à la moitié des effectifs. En caisse, au total, nous sommes une trentaine de salariées. »

 Face à ces situations, comment vous êtes-vous adaptées ?

« Il a fallu se réorganiser. Des collègues des rayons annexes ont rejoint les lignes de caisse. Je me suis retrouvée avec des poissonniers, des fromagers, des bouchers qui n'ont jamais travaillé en caisse. Beaucoup de comportements ont changé, même les plus simples. Au lieu de se serrer la main pour se dire bonjour ou se faire la bise, nous les caissières, on se donne maintenant des « petits coups de hanche ». Cela fait souvent sourire nos clients mais c'est devenu notre rituel. »

 Avec les protocoles sanitaires, vous sentez-vous bien protégées face au virus ?

« Oui. Dès le début de la crise, la protection des salariés a été une priorité. Gants, gels hydroalcooliques, nettoyages des supports, barrières de protection, marquages au sol, panneaux informatifs, visières en plastique, masques. Tout au début du premier confinement, l'épouse du directeur s'était mise à la couture pour nous confectionner des masques en tissu. »

 Quel impact a eu la crise sanitaire dans votre profession ?

« Nous nous sommes soutenus entre salariés. Ce soutien a créé de la proximité entre nous. Nous avons partagé notre quotidien bousculé. Grâce aux fusions et aux brassages entre les rayons, nous nous sommes tous rapprochés. Cette situation a permis de tisser des liens entre nous. Aussi, beaucoup de collègues ont changé de regard sur notre métier. Ils ont découvert les qualités relationnelles que la profession de caissière requiert. Ils ont constaté que la caisse était aussi l'image du magasin. En effet, la dernière image que le client a, c'est la ligne de caisse.  Cela a renforcé notre cohésion d'équipe, très importante dans une entreprise comme la nôtre, qui emploie 250 salariés. »

 Comment voyez-vous votre profession après cette crise sanitaire ?

« J'espère que notre profession sera plus reconnue autant par la clientèle que par l'ensemble des collègues. 

 Le regard des clients a-t-il changé ? 

« Oui, au premier confinement, on disait de nous que nous étions des héros. Beaucoup nous apportaient des chocolats, des gâteaux. Encore aujourd'hui, nous en dégustons. Même si le port du masque et les distances de sécurité ne permettent pas d'échanger normalement avec le client, nous recevons encore des félicitations et des remerciements. Nous apprécions ce retour positif de la part du client et nous avons ressenti que notre profession était reconnue par le plus grand nombre. En plus, nous partageons ensemble ce sentiment d'être utile ».

 Le 8 mars, c’est la journée internationale des droits des femmes. Au cours de cette journée, vous arrive-t-il d’avoir des surprises de la part des clients de l’hypermarché ?

« Il nous arrive que des clients nous offrent des roses. En Lozère, nous avons la chance d'être dans le local. Nous avons des fidèles qui nous racontent leur quotidien. Cette proximité-là, c'est une richesse. Notre magasin est également la première enseigne en France à avoir obtenu 2 fois le label égalité professionnel entre femme et homme. »

 Que direz-vous à toutes celles qui souhaitent s'engager dans votre profession ?

« C'est un métier très prenant. Certaines qui débutent sont timides, introverties, et en quelques semaines, c'est comme si les tortues sortaient de leur carapace. Elles s'ouvrent, s'épanouissent et changent, dans le bon sens. C'est un métier dans lequel on apprend énormément sur soi. »


Chantal Poyeton, présidente de l’Unité locale Croix-Rouge de Mende depuis 2012. Retraitée. Ancienne directrice de crèche à Châteauneuf-de-Randon. 3 enfants et 5 petits-enfants. Originaire de la région Lyonnaise, Lozérienne depuis 1974.

« Mon moteur, c’est ma famille, ma locomotive, c’est mon prochain ».

Chantal Poyeto

 

Pourquoi votre engagement pour l’action sociale ?

« Je pense que c’est dans les gênes. J’ai toujours aimé être à l’écoute des autres. J’ai toujours aimé aider les autres, donner de mon temps aux autres. Mon moteur, c’est ma famille, ma locomotive, c’est mon prochain. Aujourd’hui plus qu’hier, nous ne pouvons pas rester insensibles à ce qui se passe autour de nous. Il faut s’investir, chacun à son niveau, pour aider son prochain ».

Pourquoi la Croix-Rouge ?

« Quand j’ai été à la retraite, fin juillet 2012, début août, j’arrivais tout de suite à la Croix-Rouge. Cette association m’attirait sans trop la connaître. J’avais envie de m’engager, comme je l’avais déjà fait auparavant dans plusieurs associations ».

Être bénévole à la Croix-Rouge, c’est quoi aujourd’hui ?

« C’est donner de son temps. Il y a nous, les retraités, qui ont beaucoup de temps. Mais il y a aussi les jeunes, qui donnent de leur temps en plus de leur travail et de leur vie familiale. Je dis souvent aux nouveaux bénévoles qui arrivent chez nous que ce n’est pas le nombre d’heures à donner aux autres qui est important, ce sont ces quelques heures, même si elles sont minimes, qui sont primordiales.

Je leur dis aussi que lorsque nous enfilons notre costume Croix-Rouge, nous sommes tous logés à la même enseigne, autant le médecin qui vient nous aider que la petite main qui servira l’eau ou le colis alimentaire. Nous, la cinquantaine de bénévoles, nous partageons tous les mêmes valeurs. Nous sommes là pour donner aux autres. Nous sommes à l’écoute et nous n’oublions jamais de faire un sourire ».

Justement, comment la crise sanitaire a bousculé votre organisation dans la chaîne de l’aide alimentaire ?

« Sur Mende, nous sommes trois associations caritatives à distribuer, selon un planning, l’aide alimentaire : le Secours populaire, les Restos du Cœur et la Croix-Rouge.

Face à la surcharge de travail, notre association organise la distribution tous les 15 jours pour 15 jours de denrées alimentaires, à notre local 14 rue Maréchal Foch, à Mende.

Nous avons dû nous réorganiser pour faire face à l’afflux, notamment pour éviter les longues files d’attente sur le parking. Aujourd’hui, l’accueil se fait sur rendez-vous, en cadence, toutes les 5 minutes.

En temps normal, nous recevons chacune des familles pour les écouter. Elles nous font part de leurs problèmes et nous les orientons vers les services adaptés. Nous sommes souvent les seules personnes de la semaine qui leur parlent. Or malheureusement, avec la crise Covid19, nous ne pouvons plus assurer totalement ce temps d’écoute. Le temps nous manque, nous essayons quand même de sourire, de plaisanter avec eux, de leur dire un petit mot réconfortant ».

Quelle a été votre organisation au plus haut de la crise Covid 19 ?

« Durant plus de deux mois, les bénévoles se sont investis sans relâche pour porter à manger au domicile des bénéficiaires. L’organisation était très lourde, planifiée avec prises de rendez-vous et dépôts des colis au domicile.

Avec la préfecture de la Lozère, nous avons pu déposer des colis chez les personnes isolées, malades du Covid.

En 2019, nous avons servi des repas à 1700 personnes toutes les semaines. En 2020, en servant tous les 15 jours, nous avons touché plus de 2000 personnes ».

Qu’est-ce qui vous tient le plus à cœur durant cette période sanitaire inédite ?

« Ce qui me tient le plus à cœur, c’est la situation des jeunes étudiants en grande difficulté à cause du Covid19.

Il faut leur tendre la main car ils représentent la France de demain. C’est ce que l’on a essayé de faire au début de la crise avec les professeurs des lycées Peytavin, Notre Dame, l’IUT, l’IUFM, maintenant l’IFSI et que l’on poursuivra. Au total, nous accompagnons plus de 90 jeunes à travers notamment notre journée « spéciale Etudiants » tous les 15 jours. Nous prenons rendez-vous avec eux pour qu’ils viennent récupérer leurs colis ».

Que vous disent ces jeunes ?

« Qu’ils soient boursiers ou non, ils nous parlent de leurs logements mal isolés, de leur manque de moyens financiers, de leurs difficultés financières, de leur impossibilité de trouver un job d’étudiant. A certains, nous leur avons donné des couvertures de survie pour dormir la nuit. Certains nous parlent de leur honte à venir chercher des colis. Nous leur disons que nous ne sommes pas là pour les juger mais pour les aider ».

Quel message voudriez-vous faire passer pour susciter l’engagement ?

« S’engager, c’est faire preuve d’humanité, d’impartialité, de neutralité, de volontariat, d’universalité, d’unité.

Quand on s’engage, on reçoit énormément. Encore dernièrement, un bénéficiaire disait de nous que nous étions des anges ».

En cette période de crise sanitaire, quel est le message que vous souhaitez faire passer aux Lozériennes et aux Lozériens ?

« Continuez à vous entraider. Il ne faudra pas oublier que durant la crise sanitaire, il y a eu un fort élan de solidarité. Cet élan, il faudra le poursuivre ».


Marlène Dos Reis, infirmière au sein du service de médecine polyvalente à l’hôpital Lozère à Mende, depuis plus de 10 ans. 31 ans. Mariée. 2 enfants, 5 et 2 ans.

«En période sanitaire tendue, face aux difficultés, il y a toujours du positif».

Marlène Dos Reis.

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Marlène Dos Reis, à droite, aux côtés de ses collègues du service de médecine polyvalente du centre hospitalier Lozère.

Depuis le début de la crise, au quotidien, vous êtes directement exposés au virus Covid19 ?

Comment le vivez-vous ?

« Au début, nous étions dans l’inconnue, cela pouvait faire peur. Nous ne savions pas trop comment gérer la crise. Dès le début, je me suis portée volontaire pour aller travailler les premiers jours dans le service dédié au COVID19. Je me suis portée volontaire, comme de nombreux autres collègues, car de toute façon, il fallait aider et s’impliquer. Ces quelques jours de mise en place du secteur COVID au sein de l’hôpital ont été une bonne expérience : c’était nouveau, et nous avons pu exercer avec d’autres soignants avec lesquels nous n’avions pas l’habitude de travailler. »

Au plus haut sommet de la crise, comment avez-vous vécu la situation ?

« Pour la seconde vague, cela a été plus compliqué. Très compliqué. Nous avons connu un pic d’hospitalisation dans le service médecine générale jusqu’à 29 patients dont 9 COVID. Il a fallu s’adapter car tout prenait le double de temps autant pour l’habillement que pour les gestes techniques. Nous avons dû jongler pour arriver à assurer la prise en charge des patients entre l’absence de collègues de travail touchés par la Covid19 et la surcharge de travail.

Heureusement, nous sommes une équipe soudée. Dans le négatif, on trouve toujours du positif. »

En quoi votre profession a changé face au Coronavirus ?

« En soi, je ne pense pas que notre profession ait changé. Par contre, nous avons dû nous réadapter, nous réorganiser, nous montrer toujours plus disponibles pour les patients et les familles.

Les gestes barrières, le port du masque, les tenues spéciales pour les patients COVID sont entrés dans notre quotidien.

Ce qui a le plus changé pour nous, ce qui est devenu le plus difficile, c’est la gestion du patient et de son entourage. Les patients ont besoin de liens avec l’extérieur et de leurs familles. Les visites étant interdites, nous avons de plus en plus d’appels. Il faut gérer l’angoisse du patient hospitalisé et isolé, et celle des proches qui reçoivent des nouvelles seulement par nous. »

Trouver un moyen de garder le lien avec l’extérieur, ce sera l’un des défis de demain ?

« Oui, c’est certain. Si la situation perdure, il faudra trouver des solutions et des moyens pour tisser ce lien entre le patient et l’extérieur, avec les nouvelles technologies, les visios notamment. Si notre service de court séjour n’est pas directement concerné, je pense aux collègues et aux patients en long séjour, en Ehpad, en soins palliatifs, où là, le besoin est réel. »

Quelles avancées attendez-vous maintenant au sein de votre profession ?

« La reconnaissance de notre profession ! La plupart des personnels soignants n’attend pas de recevoir une médaille ou qu’on lui déroule le tapis rouge, non surtout pas. L’important, c’est d’ouvrir les yeux sur la profession en elle-même et de se donner les moyens de la revaloriser. »

Si c’était à refaire, feriez-vous le même métier ?

« Oui sans hésiter. En grandissant, au lycée, j’ai trouvé ma voie. Je souhaitais devenir infirmière. Je ne me suis pas trompée. Ce n’est pas le COVID qui va me freiner. Par contre, je comprends que des soignants, face à la galère et au ras-le-bol provoqués par la crise sanitaire, souhaitent maintenant changer de métiers ».

Qu’est-ce qui vous fait tenir aujourd’hui ?

« C’est le fait que j’aime mon métier. C’est aussi le fait que nous sommes une équipe très soudée. Dans n’importe quelle situation, notre solidarité entre nous est réelle et forte. Il est souvent arrivé que nous nous proposions pour revenir aider les collègues de la nuit. Le soutien s’est également renforcé avec les autres services. »

Le métier d’infirmière en trois mots ?

« C’est un beau métier, pas facile, en lien avec le relationnel et l’humain. »

La vaccination, c’est important pour vous ?

« Au départ, j’étais contre. Et puis j’ai réfléchi : je me suis dit que si cela pouvait permettre à mes enfants de vivre normalement sans être isolés et limités dans leur liberté, alors oui la vaccination est importante. Mes enfants, comme tous les enfants, ont besoin de découvrir le monde, de se sociabiliser, de s’enrichir de nouvelles expériences, d’entreprendre pour parfaire leurs connaissances. Si la vaccination peut permettre dans quelque temps de vivre normalement, alors je dis oui à la vaccination. Oui, je le fais pour vivre, tout simplement une vie normale »